Un carnet pour vous sauver de l'addiction aux écrans

Un carnet pour vous sauver de l'addiction aux écrans

Nous sommes dans les années 2000. Tristan, 29 ans, est ingénieur chez Google. Il travaille sur Gmail, et se rend compte qu’il est accro à ses emails à cause des notifications intempestives envoyées à chaque réception d'un email.

Tristan décide alors d'envoyer un mail collectif à ses collègues pour proposer une série de changements : au lieu d’envoyer une notification à chaque email, Gmail pourrait envoyer une seule notification groupée par jour. Google pourrait aussi afficher un message avant qu’un utilisateur clique sur quelque chose qui pourrait le distraire.

Dans le livre On vous vole votre attention, écrit par le journaliste britannique Johann Hari, on peut trouver un extrait de cet email qui va signer l'arrêt de mort professionnelle de Tristan : 

"Nous créons plus de onze milliards d’interruptions par jour dans la vie des gens. C’est dingue ! Les gens assis autour de vous dans le Googleplex contrôlent plus de 50 % de toutes les notifications qui s’affichent sur tous les téléphones portables du monde. Nous créons une course sans fin qui pousse les entreprises à trouver plus de raisons de voler le temps des gens et cela détruit notre silence commun et notre capacité à réfléchir. Savons-nous vraiment ce que nous faisons aux gens ?"

L'email de Tristan fait tellement de bruit que Google lui propose un nouveau poste pour réfléchir à ces questions. Le problème, c’est que c’est trop beau pour être vrai : à chaque fois que Tristan fait une proposition concrète pour rendre les produits Google moins addictifs, la boite lui répond : "C’est compliqué, c’est déroutant, et c’est souvent en contradiction avec notre objectif final."

Tristan vient de se heurter à une contradiction fondamentale : Google et les entreprises de la tech ne pourront pas nous aider à réduire nos distractions. Parce que plus on regarde nos écrans, plus leur chiffre d'affaires augmente :

  • Snapchat utilise le désir de connexion des jeunes et le transforme en addiction avec son système de flammes.

  • Instagram exploite notre besoin de validation sociale avec son système de likes et de followers, créant une boucle sans fin de comparaison sociale et de recherche de validation.

  • TikTok capitalise sur notre attirance pour la nouveauté avec son algorithme qui nous sert un flux infini de courtes vidéos, chacune conçue pour être plus captivante que la précédente.

  • YouTube nous maintient devant l'écran avec son système de lecture automatique et ses recommandations personnalisées, transformant une simple recherche de vidéo en plusieurs heures de visionnage.

À ce rythme, on va se retrouver avec une nouvelle fracture sociale au 21ème siècle : entre ceux qui contrôlent leur attention, et ceux qui laissent leurs journées se faire aspirer par un tourbillon de distractions non intentionnelles.

Il existe néanmoins un outil qui peut vous permettre de reprendre le contrôle. Et la bonne nouvelle, c’est que vous l’avez probablement à moins de 2 mètres de vous en ce moment-même : un stylo, du papier, un carnet.

Le pouvoir du “mode par défaut”

Reprendre le contrôle de votre attention revient à réduire le fossé entre

  • vos envies et objectifs.

  • ce que vous faites vraiment de vos journées.

Les écrans creusent ce fossé, et le papier le comble. Les plus grands artistes et penseurs vantent depuis longtemps les mérites de tenir des carnets. Prenez Anaïs Nin, qui a tenu toute sa vie méticuleusement des journaux intimes aujourd’hui publiés : 

"Nous écrivons pour goûter la vie deux fois, dans l’instant et rétrospectivement."

Ou Franz Kafka

L’un des avantages de tenir un journal est que vous prenez conscience avec une clarté rassurante des changements que vous subissez constamment.” 

Mais aujourd’hui, à une époque où Netflix déclare que son plus gros concurrent n’est pas YouTube ou la télévision, mais votre temps de sommeil, les carnets ne font pas que vous offrir une vie plus dense et plus consciente. Ils vous aident à réinitialiser ce qu’on pourrait appeler votre “mode par défaut”. 

La manière dont nous passons nos journées est la manière dont nous passons nos vies.

Cette phrase de la romancière Annie Dillard nous invite à rajouter de l’intentionnalité dans chacune de nos journées.

Deux questions peuvent vous aider à analyser cette fameuse intentionnalité : 

  1. Qu’est ce qu’il se passerait si je répétais ma journée type actuelle pendant 100 jours ? Est-ce que ma vie serait meilleure ou pire ?

  2. Imaginons que quelqu’un observe ma journée de l’extérieur. Si on lui demande son avis sur mes priorités, qu’est-ce qu’il répondrait ?

La plupart de nos journées sont gouvernées par des décisions que notre téléphone prend pour vous. Là où le “mode par défaut” est le plus présent et le plus dangereux, c’est ici. Vous vous ennuyez, hop : vous sortez votre smartphone. Vous avez votre smartphone dans la main, hop : vous ouvrez la première application de divertissement sur laquelle vous tombez. 

Pour le journaliste Chris Hayes, on vit depuis une dizaine d’années une transition qui va définir de manière durable toute notre époque. Une transition aussi massive que le bouleversement du rapport au travail après la révolution industrielle au 19ème siècle. L’attention est devenue une ressource marchande.

Et nous voici face à une question fondamentale à laquelle il est bien difficile de répondre. À quoi voulons-nous vraiment prêter attention ? Si toutes les technologies et les entreprises ne se disputaient pas notre attention, si notre attention n’était pas constamment marchandisée et extraite, à quoi choisirions-nous de prêter attention ? Si l’attention est la substance de la vie, alors la question de savoir à quoi nous prêtons attention est la question de ce que sera notre vie.

Vous avez probablement une assez bonne idée de ce que vous aimeriez faire au réveil si vous n’aviez pas la compulsion de prendre votre téléphone, ou dans les transports au lieu de scroller, ou quand vous vous ennuyez au lieu d’ouvrir YouTube.

Votre but, c’est d’identifier les moments où vous prenez votre smartphone par défaut. Et de les remplacer petit à petit par quelque chose d’autre - de plus intentionnel. Par exemple, écrire dans un carnet.

Imaginez la version alternative de votre réveil sans téléphone. Vous n’utilisez pas d’écran pendant la première heure de votre journée. À la place, vous vous faites une tasse de café, vous attrapez votre carnet et un stylo, et vous écrivez 3 sujets. Ça peut être des choses qui vous prennent la tête, qui vous intriguent, qui vous stressent, qui vous rendent curieux… 

Ensuite, vous vous posez la question suivante : “si je réussissais aujourd’hui à avancer sur l’un de ces trois sujets, est-ce que ma journée serait réussie ?”. Si la réponse est oui, c'est le moment de bloquer dans votre calendrier des heures sans téléphone, sans notifications, sans accès aux réseaux sociaux.

Choisir d’explorer vos pensées à la place de regarder un écran, c’est expérimenter la puissance d’un rendez-vous avec vous-mêmes.

Les outils qu'on utilise nous façonnent 

Connaissez-vous le site que le magazine The Atlantic a nommé “la pire page d’internet” ?

Ça ressemble à ça : une page vierge avec un bouton sur lequel vous pouvez cliquer. Au fur et à mesure, la page se remplit de différentes stimulations qu’on adore rechercher dans la vie de tous les jours : une playlist, vos emails, du son de pluie en arrière plan Au bout de 10 minutes à cliquer, vous vous retrouvez dans un enfer multi-sensoriel qui perturberait probablement à vie n’importe quel être humain de l’ère pré-internet.

“Cette monstruosité [....] s’appelle Stimulation Clicker, et c'est plus qu'un jeu. C'est une reconstitution de l'évolution d'Internet, une parodie affectueuse de son contenu et un commentaire acerbe sur la façon dont notre vie en ligne a mal tourné. En donnant vie à chaque élément du Web et en les superposant les uns aux autres, le jeu recrée le paradoxe de l'Internet moderne : individuellement, ses composants sont agréables. Mais collectivement, ils sont insupportables. Quand tout sur Internet exige de votre attention, prêter attention à quoi que ce soit devient impossible.”

Un carnet, c’est l’inverse de cette page. Quand vous prenez vos notes sur un ordinateur ou sur un téléphone, vous avez à portée de notification des dizaines de distractions. Vous comptez peut-être sur votre auto discipline, mais le combat est perdu d'avance. Si vous êtes en train d’écrire un article par exemple, vous allez surement faire des recherches sur le sujet sur Internet. Le problème, c’est que faire des recherches, ça rentre dans la catégorie de ce qu’on appelle le “mode multitâche”. 

Dans On vous vole votre attention, Johan Hari s’est entretenu avec Earl Miller, un neuroscientifique qui explique que le multitasking est un tue créativité. 

“Faire plusieurs choses à la fois peut nous rendre considérablement moins créatifs. Pourquoi ? Les pensées nouvelles viennent des nouvelles connexions que notre cerveau établit à partir de ce qu’on a vu, entendu et appris.

Si on lui en donne l’opportunité, avec du temps et sans distractions, notre esprit passe automatiquement en revue tout ce qu’il a assimilé et crée de nouvelles connexions entre tous ces éléments. Tout ceci se produit au niveau de l’inconscient, et pourtant c’est ce processus qui nous permet de former des idées, et de relier entre elles deux réflexions qui semblaient au départ n’avoir aucun rapport. Une nouvelle idée est née.

Mais si vous passez une grande partie de ce temps de traitement cérébral à alterner et corriger des erreurs, vous privez votre cerveau d’opportunités de suivre les connexions jusque dans des lieux nouveaux, qui permettent d’avoir des réflexions vraiment originales et créatives."

Demandez à n’importe quel écrivain, chercheur ou artiste où est-ce qu’il a eu sa dernière idée pour son livre, sa recherche ou sa création. Il est très probable qu’il vous réponde “sous la douche”, “dans les transports” ou “en marchant”, des moments où le cerveau est libre de connecter des concepts entre eux pour créer de nouvelles idées. Éloignez-vous des écrans à chaque fois que vous avez particulièrement besoin d’être créatif. Utilisez un carnet pour réfléchir sans distractions, pour permettre à vos idées de se connecter entre elles. Passez sur votre ordinateur seulement après avoir donné la chance à votre cerveau de faire toutes ces connexions.

Tous les artistes ou penseurs tiennent des carnets. Prenez le cas d’Alexandro Jodorowsky, un auteur et réalisateur. Il avait commencé un de ses carnets en écrivant “Dune” sur la première page - il a réalisé une adaptation de ce livre de science fiction, et il voulait sûrement utiliser le carnet pour ce projet.

Mais à la place, il a rempli le carnet de dessins sur le tarot de Marseille, en faisant de la libre association d’idées. C’est exactement le type de créativité qu’on ne peut pas avoir sur un écran.

Il y a aussi les carnets fascinants de Léonard de Vinci, où vous pouvez voir des schémas biologiques qui côtoient des pensées philosophiques et des inventions - encore une chose qui ne pourrait pas arriver devant un écran, surtout pas si vous rangez chaque projet dans son dossier.

Qu’on soit bien clair - le papier ne va pas remplacer votre ordinateur ou votre téléphone. Il va vous aider à retrouver un rapport plus intentionnel à la technologie. Parce que les outils qu’on utilise façonnent nos manières de penser.

Word vous permet de dépasser votre peur de faire des erreurs - parce que vous pouvez les effacer très facilement. Evernote vous encourage à collectionner et accumuler les références et les idées. Notion vous transforme en un obsédé de la personnalisation et de l’optimisation.

Les carnets papier vous permettent d’être plus intentionnels, plus créatifs - et de voir à quoi ressemblent vos pensées quand vous n’êtes pas sur-stimulé par 5 minutes sur Instagram.

Il y a aussi quelque chose de très beau à garder une trace physique de ce qui capture votre attention, comme on peut en faire l'expérience sur le site de Cambridge en feuilletant le carnet de Newton, rempli de pages sautées, d’épiphanies, de ratures, de pensées révolutionnaires et d’idées qui ne vont nulle part.

Quand vous ouvrez votre ordinateur ou votre téléphone, vous n’ouvrez pas un outil neutre. Vous ouvrez des applications colorées avec une énergie particulière. Et ceux d’entre vous qui créent du contenu savent très bien que le biais de négativité fait plus cliquer que n’importe quoi.

La négativité que vous voyez sur les réseaux sociaux est une fonctionnalité, pas un bug.

Ouvrir un carnet, c’est ouvrir un outil qui est coloré par votre propre énergie, vos propres pensées - pas par celles qui génèrent le plus d’argent aux investisseurs de la Silicon Valley.

Conclusion : Choisir sa vie

C'est le comble de l'ironie : les créateurs de ces technologies addictives sont les premiers à nous mettre en garde.

Prenez Nir Eyal, l'investisseur auteur du livre Hooked: Comment créer un produit ou un service qui ancre des habitudes. En 2014, il publie ce livre devenu la référence pour créer une startup. 6 ans plus tard, Eyal sort un nouveau livre intitulé Imperturbable - Comment s'affranchir des distractions du monde numérique et rester maître de sa vie. Après avoir aidé la Silicon Valley a créé l'addiction aux écrans, Nir Eyal explique cette fois comment élever des enfants concentrés dans un monde de plus en plus déconcentrant.

Oui, contrôler son attention, c’est choisir sa vie.

Le faire avec des carnets, c’est s’offrir des possibilités infinies de se concentrer sur ce qui compte pour vous.

Nous créons un carnet pour chacune de vos priorités :

  • Un carnet pour vous aider à écrire votre premier roman
  • Un carnet pour vous aider à vous organiser
  • Un carnet pour vous lancer dans l’entrepreneuriat.
  • Un carnet pour réaliser vos rêves.